DE LA MORANDIÈRE Ch.
« Histoire de la pêche française de la morue dans l'Amérique Septentrionale »
 
Paris, G.P. Maisonneuve et Larose, 1962-1966, in-8 (), xviii-1397, 3 volumes reliés.
 
Reliure en plein papier, dos lisse, titrage sur les dos et les premiers plats, petit accrocs sur les marges des plats et les coiffes, plis de lecture sur le dos du deuxième volume, intérieur bien frais.
 
28 planches (tableaux ou photos) en noir et blanc en pleine page ou dépliantes.
 
[Ce magistral ouvrage offre un double et puissant intérêt, d'abord pour la connaissance de la pêche à la morue naturellement, mais aussi pour l'histoire de l'expansion française outre-mer puisque elle est étroitement liée au sort de nos anciennes colonies canadiennes d'Acadie et de l'Ile Royale, dénommées Nouvelle Ecosse et Cap Breton depuis le temps lointain où elles sont passées sous l'autorité britannique, de celui de nos établissements à Terre-Neuve, enfin des îles Saint-Pierre et Miquelon, dernier vestige de la grandeur française en Amérique du Nord.
 
Issu d'une famille normande originaire de Granville dont il a écrit l'histoire et qui fut un des principaux ports d'armement de la pêche à la morue, M. Ch. de la Morandière était particulièrement qualifié pour traiter ce sujet. Après avoir expliqué en détail la construction des différents types de navires, leur ravitaillement, leur recrutement, la composition et la rémunération des équipages, il précise ce qu'il faut entendre par morue verte et par morue sèche, enfin comment se pratiquait la vente du produit de la pêche et l'apurement des comptes de liquidation.
 
Il aborde ensuite l'histoire proprement dite de la pêche à Terre-Neuve : les premiers armements, les ports d'armement, leur activité, les dangers de la pêche, la protection de celle-ci, ce qui sépare la pêche de la morue verte de la pêche sédentaire.
 
Cela le conduit à relater le fonctionnement du port de Plaisance situé sur la côte Sud-est  de Terre-Neuve, de l'Ile Royale et des Iles Saint-Pierre et Miquelon. Histoire agitée s'il en fut, la perte de Plaisance et des autres établissements français sur la côte méridionale de Terre-Neuve en 1713, de l'Ile Royale en 1758, l'expulsion en 1778 des habitants de Saint-Pierre et Miquelon par les Anglais, leur retour en 1783 ruinés mais non découragés. C'est leur vie dans des abris provisoires et la reconstitution de leur flottille et de leur matériel de pèche, qu'il explique avec une grande précision. M. Ch. de la Morandière sait avec un rare talent éviter l'aridité d'un sujet technique, et épargner à ses lecteurs d'inutiles digressions. L'essentiel est dit, d'une manière accessible à tous et, ce qui n'est pas un mince compliment à l'heure actuelle, dans un excellent français.
 
Il faut souhaiter qu'il ajoute prochainement un troisième volume aux deux premiers, qui conduirait sa belle œuvre jusqu'à nos jours. Il reste en effet beaucoup à écrire sur l'expulsion des habitants de Saint- Pierre et. Miquelon en 1793, leur réinstallation dans ces îles en 1816, sur l'amélioration des conditions d'existence des marins, la mise en service d'un navire hôpital, la substitution progressive d'unités modernes aux anciens voiliers, la transformation des méthodes de préparation et de conservation du poisson aux xixe et xxe siècles.
 
D'un point de vue personnel, c'est avec émotion et reconnaissance que l'auteur de ces lignes qui descend à la fois des courageux et patriotes colons d'Acadie et des héroïques pêcheurs, tant charentais que basques, de Plaisance, de l'Ile Royale et de Saint-Pierre et Miquelon, présente à M. Ch. de la Morandière ses vives félicitations pour avoir témoigné à leur égard une sympathie aussi éclairée.
 
Source : Jore L. Ch. de la Morandière, Membre du Comité de documentation de la Marine, Histoire de la pêche française de la morue dans Septentrionale (des origines à 1789). In: Revue française d'histoire d'outre-mer, tome 49, n°175, deuxième trimestre 1962. pp. 288-289;]